Chère amie, cher ami,
Dans la France des mobilités, il y a une première et une seconde classe. Certains peuvent aller partout et y aller vite. Train, voiture, vélo, avion, RER, bus : ils ont souvent l’embarras du choix. D’autres doivent se contenter d’une gare à plusieurs kilomètres de leur domicile, de leur voiture vieillissante et polluante, avec un prix de l’essence qui ne fait qu’augmenter, ou bien de leurs seuls pieds.
Cette seconde classe à laquelle sont abonnés des dizaines de millions de Français, nous, élus socialistes et de gauche, ne pouvons plus la tolérer. Les mobilités représentent aujourd’hui un enjeu politique majeur, au cœur du projet d’émancipation, de justice sociale, et de développement économique que nous portons dans nos territoires. Elles sont aussi et surtout au centre de la réponse que nous devons apporter à l’urgence climatique.
Nous ne bougerons plus comme avant : voilà un fait qu’il nous faut accepter. Les défis de notre temps exigent plus de sobriété, de respect, et la fin de l’inconscience face aux kilos de CO2 générés. Si nous voulons moins polluer, si nous voulons décarboner, si nous voulons que les Français prennent moins la voiture, la réponse n’est pas tant la culpabilisation que l’alternative : plus et mieux de train. Le délitement du ferroviaire, auquel nous assistons depuis des décennies, ne peut plus durer. De l’amaigrissement des trains de nuit aux fermetures des petites lignes, c’est une France rabougrie qui se dresse aujourd’hui devant nous, un Hexagone où un trajet sur une ligne normande en 2022 est plus lent qu’en 1972.
Il nous faut non seulement ressusciter l’ambition du rail d’hier, mais aussi inventer le rail de demain. Nombre d’entre nous, dans nos territoires, sommes les dépositaires de cette aspiration. En Occitanie, nous avons par exemple nvesti massivement pour promouvoir le ferroviaire et permettre ce beau projet qu’est le « train à 1 euro », un week-end par mois. Dans de nombreuses villes et métropoles, la gratuité des transports fait son chemin pour que s’épanouisse le rail du quotidien, comme à Nantes ou Montpellier. Partout, les forces politiques de gauche ne ménagent pas leurs efforts pour rouvrir ou préserver des lignes condamnées par ceux qui préfèrent la rentabilité au service public.
Mais les collectivités, aussi volontaristes qu’elles soient, ne peuvent pas tout si elles restent seules. En France, dans ce pays à la décentralisation inachevée, l’Etat conserve une place prépondérante sur tous les sujets ; le ferroviaire n’y fait pas exception. Il suffit de tourner le regard en direction de nos voisins européens pour y voir des exemples qui devraient nous inspirer, entre l’abonnement ferroviaire allemand à 9 euros, le volontarisme espagnol et même les engagements inédits de l’Italie à investir des montants records dans son rail. C’est donc dès maintenant que le gouvernement doit assumer une politique volontariste d’investissement, aux côtés des élus locaux, pour plus de train, plus de gares et des prix plus attractifs. C’est le sens du « new deal ferroviaire » auquel j’appelle de mes vœux avec l’ensemble de mes collègues présidents de régions de France.
Une France verte, sociale et reconnectée : voilà le combat de la gauche du XXIe siècle qui peut nous faire retrouver le chemin de la confiance de nos concitoyens. Face à la responsabilité historique qui est la nôtre, il nous faut en faire une réalité, et vite.
Carole DELGA, Présidente de la FNESR